Béziat, 40 ans que ça dure !
De l'extérieur, le site ne paye pas de mine. Il faut en effet aller au bout d'une impasse, le long de la voie de chemin de fer, et suivre un panneau un peu délabré indiquant en gros "BEZIAT", pour trouver la plateforme éponyme. C'est à Bègles, à deux pas du mythique stade André Moga, que la société est implantée depuis 1993. Cette référence de la pièce sur la place bordelaise est cependant méconnue. Son patron, Michel Béziat, prête peu d'importance au clinquant et cultive une discrétion propre à beaucoup d'autres dans son métier.
Derrière la façade du bâtiment comme du dirigeant se cache pourtant une riche histoire qui méritait bien un arrêt en Gironde. Une histoire qui a pris forme bien avant le mois d'avril 1981, date à laquelle la plate-forme a été fondée. Avant de devenir des "piéçards", les Béziat ont d'abord été des "pompistes". Fernand et Simone, les parents de Michel, ont ainsi géré dans un premier temps des stations-service, avec l'aide de leur fils dès son enfance, dans le Nord de la France puis à Bordeaux. Une terre d'accueil qui deviendra rapidement un port d'attache, puisque c'est là que va s'écrire le deuxième chapitre de la destinée familiale.
Chemin faisant, la famille est sollicitée au début des années 80 pour démarrer dans une nouvelle activité. Au revoir le carburant, bonjour les échappements ! Sollicités par Bosal pour ouvrir un dépôt appelé à rayonner dans le Sud-Ouest, les Béziat se lancent avec un petit local (en réalité une ancienne église !) situé dans le centre-ville de Bordeaux. Le jeune Michel suit ses parents et le trio, complémentaire et soudé, permet à la structure de trouver son public.
25 % de l'activité au comptoir
Rapidement, les affaires fonctionnent, un second entrepôt est inauguré à Toulouse en 1983, toujours à la demande de Bosal. De nouvelles marques entrent en rayon et l'activité dépôt est progressivement complétée par du négoce. Une stratégie singulière pour l'époque, se remémore le patron, et bien sentie. En 1988, Bosal souhaite reprendre la main sur sa distribution. La collaboration s'arrête, le site de Toulouse ferme ses portes, mais les Béziat sont tout heureux d'avoir diversifié leur activité. Malgré ce départ, l'entreprise confirme sa dynamique et, à l'orée des années 90, se trouve à l'étroit dans ses murs. En 1993, la décision est prise de déménager.
À Bègles, les Béziat rachètent à Gefco un vaste bâtiment de 4 000 m² au sol, qui seront enrichis au fil du temps par l'ajout de plusieurs mezzanines, portant à 6 000 m² la surface totale du site. Au-delà des chiffres, c'est aussi la situation qui a convaincu les dirigeants de miser sur cette localisation avec la rocade à proximité et un accès direct au centre-ville, deux éléments cruciaux pour une structure qui livre au comptoir jusqu'à 25 % de ses 300 à 400 colis quotidiens. À l'intérieur, la plateforme ne fait pas dans le détail. Avec 170 000 références, elle est la plus grande du marché local.
C'est tout l'intérêt d'être indépendant. Le client ne vient pas chez nous pour le 20/80, il vient pour se dépanner, pour trouver ce qu'il ne trouve pas dans son groupement souligne Michel Béziat.
Loyal envers GPI
Ce stock immense est aussi l'héritage des années dépôt, une activité que le dirigeant n'a jamais souhaité délaisser et qui pèse aujourd'hui autant que le négoce. "Je tiens au dépôt car ça incite tous les clients potentiels de la marque en question à venir chez nous. Et comme nous entretenons par ailleurs de bonnes relations avec nos partenaires, nous pouvons aussi faire du négoce avec leur stock." Du vrai gagnant-gagnant.
Outre la profusion de pièces, c'est également la diversité de marques qui attire l'œil dans les allées. Fin connaisseur de sa zone de chalandise (elle s'étend des Charentes aux Pyrénées, soit une douzaine de départements), Michel Béziat a fait le choix de distribuer tous types de pièces, "pourvu qu'elles soient de qualité".
À Bordeaux, nous sommes dos à la mer. Le potentiel de croissance n'est pas aussi important qu'ailleurs, et le pouvoir d'achat est plutôt faible en termes de pièces. Ne vendre que des références premium serait un non-sens, ça ne fonctionnerait pas ici, explique-t-il.
Le spectre varie de deux à cinq cartes selon les familles, avec tous les niveaux de tarifs proposés. La seule contrainte que se fixe le dirigeant depuis plusieurs années est de respecter les accords GPI, une structure que Béziat a intégrée dès son lancement en 2016. Bien que "farouchement indépendant", le patron explique "qu'à un moment, on a compris qu'il fallait s'allier à un groupement, GPI en l'occurrence, qui s'apparente d'ailleurs plus à une centrale de référencement et d'achat".
Les trois marques rentrées en 2021 sont ainsi toutes référencées chez GPI. Une question de loyauté qui a peut-être été mise à mal en fin d'année avec l'arrivée à Bordeaux de DCA Plateforme et celle, imminente, d'Altone, deux adhérents du groupement. Si Béziat sera le seul représentant GPI sur cette zone, la société voit tout de même débouler deux confrères sur son terrain de jeu. "C'est le revers de l'indépendance. Chacun est maître de sa stratégie", élude le patron qui s'est toujours tenu à l'écart des batailles de clochers entre concurrents.
Le poids de l'équipement de garage
"On regarde ce que font les autres, mais on ne s'amuse pas à partir à la chasse aux remises. Faire des volumes et du chiffre au détriment de la marge, ça n'a aucun sens, ça ne m'intéresse pas", dit-il. D'autant moins que son entreprise peut compter sur d'autres atouts. Ainsi, depuis toujours, elle performe sur le segment de l'équipement de garage. Une activité qui représente environ 20 % de ses 8 millions d'euros de chiffre d'affaires (avec environ 200 ponts écoulés annuellement) sur laquelle Béziat fait, là encore, figure de référence.
Si Michel Béziat peste actuellement en raison des soucis d'approvisionnement, sa société a su se faire une place sur ce marché en développant des services bien utiles, comme cette offre "clé en main" pour les distributeurs, qui leur permet de vendre du matériel sans se préoccuper du stock, de la livraison et de l'installation, qui sont assurés par Béziat ; ou encore en étant le fournisseur de pièces détachées attitré du groupe italien Ravaglioli.
Aujourd'hui, Michel Béziat, qui peut compter sur le précieux soutien de son épouse dans la gestion quotidienne de l'entreprise, n'ambitionne pas de voir plus grand ni de dupliquer ailleurs son entreprise. Mettant en exergue la fidélité entretenue avec ses partenaires et la grande qualité de son équipe (18 personnes), le dirigeant souhaite poursuivre sur la tendance actuelle. Celle d'une plateforme discrète mais qui, année après année, confirme sa croissance.